Au miroir du mouvement des Gilets jaunes, l’élite politique, intellectuelle, culturelle a laissé voir son vrai visage. Début janvier 2019, le président promet d’éviter ces « petites phrases » qui risquent d’être mal interprétées, mais il rechute aussitôt. Les médias ne devraient pas, dit-il, donner sur leurs antennes « autant de place à Jojo le Gilet jaune qu’à un ministre ».
Ainsi se révèlent l’étendue et la profondeur de la fracture qui sépare les « élites » des « gens d’en bas ». Fracture géographique, économique, politique et sociale. Et surtout fracture culturelle, entre les habitants des grandes villes, et tous les autres.
La violence et les embardées de langage de quelques-uns ont jeté le discrédit sur les Gilets jaunes. Il ne faudrait pas qu’une élite, assurée de sa légitimité, en tire argument pour occulter la force d’un mouvement qui a fait entendre une exigence de justice et d’égalité, parfois confuse, mais toujours profondément démocratique. Retrouvant ainsi l’inspiration des grands sursauts populaires qui ont marqué notre histoire.
« Il y a ce que disent les Gilets jaunes. Il y a surtout ce qu’ils révèlent. Cette manière de parler d’eux, dans la presse, les médias, les milieux politiques, sur les réseaux sociaux! Une distance, une condescendance, un mépris ».
Danèle Sallenave
Éditeur original : Gallimard (acheter sur Amazon)
Critiques
- Danièle Sallenave n’angélise pas les débordements, ni certaines ambiguïtés de ce mouvement social inédit. Mais elle refuse de répéter des erreurs vues lors de Mai-68.
Lire n° 476, Hubert Artus et Baptiste Liger, juin 2019 - Quand Macron a parlé de « Jojo avec un gilet jaune », Danièle Sallenave, de l’Académie française, a entendu « affreux jojo »… Elle en a fait un essai bref et percutant sur le mépris de classe. […] Danièle Sallenave, en arrière-petite-fille d’un cheminot et d’une ouvrière à la peine sur un lavoir municipal en bord de Loire, ne s’engourdit pas sous les ors de la République. Grâce à elle, l’Académie française prend l’allure d’un grand et digne service public où sont questionnés les mots blessants pour les classes populaires.
L’Obs n° 2842, Anne Crignon, 25 avril 2019 - C’est un tout petit livre, écrit d’une traite par Danièle Sallenave. Presque un coup de sang […]. S’il n’apprend rien de nouveau sur la fracture sociale, et même culturelle, il porte un regard généreux et un réjouissant décentrage sur ce « retour du social ».
Libération n° 11793, Frédérique Roussel, 3 mai 2019 - La formule donne, c’était irrésistible, le titre du livret écrit au galop de Danièle Sallenave. Galop de la pensée éclairée, car le savoir très profond de l’académicienne lui permet de mettre en perspective les derniers événements avec nombre d’épisodes historiques (…), de données sociologiques (…) et de réflexions philosophiques (…), dans un style limpide qui donne à cet essai le naturel d’un récit, presque d’une nouvelle.
La Croix n° 41389, Antoine Peillon, 24 avril 2019 - Danièle Sallenave, académicienne depuis 2011, exprime, dans un court et juste essai intitulé Jojo, le Gilet jaune, sa connivence avec un mouvement s’adressant « à ceux dont elle vient » et son indignation face au mépris de classe que lui ont opposé mondes politique et culturel.
Telerama n° 3623, Romain Jeanticou, 19 juin 2019
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